Adieu Aaricia
Seul sur la berge, un vieil homme regarde la barque dans laquelle il vient de coucher sa bien-aimée. L’eau noire emporte l’embarcation, et c’est toute sa vie qui s’échappe avec elle.
Deux éditions sont proposées pour ce premier album de la collection Thorgal Saga. Et il ne sera pas facile de choisir entre les deux ! Pour vous aider à définir l’album qui sera le plus adapté à votre bibliothèque et à votre porte-monnaie, voici une présentation complète et comparative de ces deux belles éditions que, selon les standards habituels de la série, on peut toutes deux qualifier d’édition « de luxe ».
Les voici d’ailleurs sous blister, l’une contre l’autre, elles ne se quittent plus.
Le premier élément de comparaison est la couverture. Le rouge de l’édition augmentée se confronte au bleu de l’édition traditionnelle. Sur la bleue, un Thorgal aux cheveux blanchis et aux épaules voûtées fait face à un bateau en flammes, qui s’éloigne dans le fjord. Le visage enfantin d’Aaricia apparaît dans les volutes de fumée. Du côté rouge, l’ambiance est différente mais tout aussi inquiétante. Dans un lieu aux contours infernaux, un être étrange et flippant, armé d’un large couteau, se penche sur une fillette terrifiée. Brrr.
La taille de l’album est l’autre différence qui saute aux yeux. L’album bleu mesure 24 par 32 cm, le rouge est nettement plus grand, 27 par 35. Il porte aussi un autocollant précisant qu’il a quelques particularités !
La quatrième de couverture est superbe, mise en valeur par l’un des plus beaux dessins du début de l’album. La maquette est la même pour les deux albums.
Les inscriptions au dos attirent l’œil et la lumière, grâce à une superbe encre cuivrée, la même qui orne différents éléments de la couverture. On y retrouve le nouveau logo créé spécifiquement pour la collection. A-t-il vocation à apparaître demain dans les albums de la série originelle ? L’avenir le dira.
Ce qui saute aux yeux, également, c’est l’épaisseur de l’album rouge. Il propose quelques pages supplémentaires, mais il est surtout imprimé sur un papier plus épais. On en reparle tout à l’heure.
Si vous réfléchissez déjà au meilleur emplacement pour votre album dans la bibliothèque, il va falloir lui choisir un nouveau coin. Qu’il soit bleu ou rouge, « Adieu Aaricia » propose un grand format luxueux, bien supérieur à celui de l’édition traditionnelle que nous connaissons tous. Le format, la couverture, le papier : Thorgal Saga présente ici une approche inédite.
Avant de poursuivre, prenons le temps de jouer avec la lumière et avec cette superbe encre cuivrée. C’est beau, c’est beau, c’est beau.
En retournant l’album, on reste dans ces mêmes standards élevés. L’aspect mat du reste de la couverture participe au plaisir des yeux et des doigts.
L’album rouge n’est pas jaloux. Avec son format et son poids élevés, il est même particulièrement impressionnant.
On reconnaît avec plaisir la frise originelle qui décore nos albums depuis 40 ans. Amputée et raccourcie, elle reste belle et bien mise en valeur. Elle permet aussi à la maquette de conserver un lien avec son aînée. On en a un peu besoin pour ne pas être trop déstabilisé. Des choix forts ont été faits pour réinventer un objet dont les contours deviennent modernes, valorisés.
Un superbe dessin inédit donne le ton à l’ouverture. Là aussi, plutôt bleu ou plutôt rouge selon la version.
C’est parti ! Vous le ressentez, ce petit frisson ? Une nouvelle ère pour notre vieux Viking ?
Les couleurs ont été réalisées par Gaétan Georges, le talentueux coloriste de la plupart des albums récents, responsable aussi de la nouvelle mise en couleurs des trois premiers tomes de la série — à voir dans l’atelier de « La magicienne trahie », si la nouvelle vous avait échappé.
Et c’est parti pour plus de 100 pages de lecture. On retrouve la traditionnelle mise en page thorgalienne, en trois bandes et six à dix cases. On retrouve aussi des personnages bien connus.
Plus lisse, plus satiné et apparemment plus épais que dans un album habituel de Thorgal, le papier est agréable et facilite le jeu des doigts sur les pages. Ça tombe bien, parce qu’elles s’enchaînent rapidement, avec des dialogues courts et ciselés.
L’auteur Robin Recht salue les lecteurs en fin d’ouvrage, en leur livrant quelques clés de son parcours thorgalien. Presque un mot d’amour, placé au bon endroit, après la lecture.
La dernière page évoque le prochain tome et nous invite déjà à rejoindre l’année 2024. Pas trop vite ! On va déjà profiter de cet album-là.
Vous le voyez, l’album bleu, celui qu’on désigne comme étant l’édition classique, est déjà dans des standards très élevés. Il est temps de voir ce que propose en plus la fameuse édition rouge augmentée.
Elle s’ouvre sur une sacrée surprise : un ex libris superbe, en pleine page, sur papier cartonné gaufré. Signé par l’auteur, avant d’être inséré directement au sein de la pagination. Mais oui, l’ex libris fait ici pleinement partie de l’album ! D’où l’appellation de « frontispice » qui se trouvait sur le macaron collé en couverture. Les amis, ça commence fort.
Pas de noir et blanc dans cette version grand format, il a été choisi de proposer ici un album susceptible de plaire peut-être plus largement au grand public. Par contre, la promesse du grand format est tenue. Pas de marges élargies, le dessin s’étend pour occuper l’espace en version cinéma. C’est grand et c’est beau.
On ne le voit pas bien sur ces malheureuses photographies, mais le papier n’est pas du tout le même. Plus épais, il a ici un rendu mat très différent, sans aucun reflet. Les amoureux du beau papier vont apprécier. Le toucher est aussi très différent, il accroche le doigt et retient le geste. De toutes façons, on y va doucement, le bouquin vaut quand même 40 balles. À ne pas mettre entre toutes les petites mains, il faudra le récupérer en PDF sur le darknet si vous voulez le faire lire à vos gamins.
Pour justifier son appellation, l’édition augmentée reçoit un cahier graphique de neuf pages, pour la plupart en noir et blanc.
Les esquisses et travaux divers autour des personnages sont accompagnés de commentaires de l’auteur, qui permettent de suivre en partie ces étapes de création. On sent Robin Recht impliqué et désireux de nous accompagner jusqu’au bout.
Qu’ils soient nouveaux au casting ou anciennes gloires de la série, les héros nous sont présentés avec soin.
Dans un format qui vous rappellera certains des somptueux ateliers du mirifique site Thorgal.com, quelques pages invitent à accompagner Robin Recht dans ses crayonnés et ses mises en pages. Il est très agréable de pouvoir flâner auprès de lui, notamment grâce aux textes qui invitent à prendre un peu de temps avant de refermer le livre.
Et pour les déçus, tombés amoureux de la couverture bleue, pas de panique, c’est même elle qui vient clore ce cahier graphique.
Bon, vous voilà arrivés ici et vous vous demandez peut-être quelle version vous allez choisir…
On ne vous a pas aidés, en vous suggérant qu’elles sont toutes les deux superbes.
Voici quelques éléments pour vous guider un peu, éventuellement :
- L’édition bleue est la moins chère — 23€50 — et propose cette belle couverture mélancolique et poignante. Elle est en grand format mat avec encre cuivrée. Elle a les dimensions qu’auront les futurs tomes de la collection Thorgal Saga. Son papier est satiné. La couverture rouge n’est pas incluse.
- L’édition rouge est plus chère, presque le double — 40 € — mais dans un format bien supérieur, avec un beau papier mat de très belle qualité. La couverture bleue est incluse. Elle a un cahier graphique, et un frontispice signé par l’auteur. Elle est limitée à 3160 exemplaires, ce qui signifie qu’elle ne sera plus disponible dans quelques mois ou années. Mais il n’est pas certain que les futurs tomes de Thorgal Saga seront tous proposés dans ce format.
À vous de jouer. Bonne lecture !