L’île des mers gelées
Alors que les Vikings semblent enfin l’accepter parmi eux, Thorgal assiste, impuissant, à l’enlèvement d’Aaricia par deux aigles géants. Il devra la suivre jusqu’aux confins des mers gelées.
Voici une petite incursion dans l’atelier du dessinateur Grzegorz Rosinski. En 1978, année de réalisation des planches de l’album, Rosinski vit en Pologne et envoie ou apporte ses travaux chez son éditeur en Belgique. Pas toujours facile à l’époque de franchir les frontières européennes !
Le dessinateur s’occupe alors de toutes les phases de création de la planche. A partir des scripts de Jean Van Hamme, il dessine et encre les cases, avant de les mettre en couleurs. Il s’occupe également du lettrage, alors qu’il ne maîtrise pas le français – il trace donc les lettres en suivant un modèle.
L’étape de la mise en couleurs était bien sûr complètement manuelle à l’époque. Il est intéressant de comparer les cases du début et de la fin de cet album, car cette mise en couleurs semble avoir été réalisée avec deux techniques différentes !
Dans cette première case interactive, on peut apprécier l’ombrage de la voile et de la coque du navire, mélange savant de couleurs placées et d’encrage soigné. Dans l’eau, c’est différent, l’encrage simule le tumulte alors que les couleurs posent le reflet de la voile.
(déplacez la souris ou le doigt de gauche à droite sur la case)
Contraintes techniques ou envie de tester différentes approches ? Au début de l’album, Grzegorz place ses couleurs sur une feuille, manifestement sans utiliser la technique du « bleu » (voir plus loin).
Dans cette deuxième case interactive, on peut apprécier notamment la texture des deux capes, celle de Bjorn en peau et celle en tissu de Jorund. Les couleurs sont tranchées, éclatantes, caractéristiques des premiers albums de la série (et du style des années 70).
A la fin de l’album, les couleurs sont déposées sur une feuille pré-imprimée, sur laquelle l’encrage est atténué, bleu ou gris, pour faciliter le travail du coloriste et de l’imprimeur.
Dans cette troisième case, Thorgal et le seigneur aux trois aigles s’affrontent, la diplomatie l’emporte temporairement sur la force. Le blanc est la couleur principale, l’image est plus teintée que colorée.
L’encrage un peu épais des premiers albums va fortement s’affiner dans les tomes suivants.
Cette dernière case interactive joue la 3D grâce à un placement judicieux des couleurs. Les courbes et les cheveux d’Aaricia sont mis en valeur, la joie du héros vainqueur aussi. La lumière directionnelle attire déjà Thorgal vers la suite de son aventure. Vous remarquerez aussi que, sorti du contexte, le dialogue entre Thorgal et Aaricia est particulièrement cucu.