Une démarche originale
A l’initiative de l’association Bannoù-heol, des livres pour enfants et des albums de bande dessinée sont édités depuis quelques années en breton, langue celtique spécifique à la Bretagne (région de l’ouest de la France).
Parmi les bandes dessinées, à part Thorgal, on peut ainsi lire Boule & Bill ou Titeuf en breton.
Le breton de nos jours
Langue celtique importée de Grande-Bretagne il y a plus de 1000 ans, le breton, apparenté au gaulois, est plus ancien que le français !
Sa transmission a longtemps été essentiellement orale, au sein des familles. Mais cette transmission familiale ayant pratiquement disparu, le breton est devenu une langue en danger… d’où un certain nombre d’initiatives, depuis 40 ans, visant à diffuser et pérenniser l’emploi de la langue bretonne.
Actuellement, en Bretagne, une trentaine d’écoles primaires, cinq collèges et un lycée proposent un enseignement bilingue à environ 10000 enfants. D’où l’importance de proposer à ces enfants des albums contemporains et attractifs, comme peuvent l’être Titeuf ou… Thorgal !
Entretien avec Bannoù-heol
Qui peut parler de ce projet mieux que ses concepteurs ? Rencontre avec Arno Elegoed, président de l’association Bannoù-heol, et Tudual Audic, traducteur des albums de Thorgal.
En quoi consiste l’association Bannoù-heol ?
Arno Elegoed : L’association (de type 1901) « Bannoù-heol » (Rayons de soleil en breton) a été créée en janvier 1999. Son but est de publier le maximum de livres en breton à l’intention des jeunes. Les premiers livres qui ont été édités sont bien connus des enfants puisqu’il s’agit de bandes dessinées : Boule & Bill, Titeuf, Thorgal et de livres pour enfants : Olive, Petit Ours Brun. Ces albums s’ajoutent à l’important travail réalisé depuis une bonne vingtaine d’années par des maisons d’édition telles que An Here ou Keit vimp bev. Nos ouvrages sont édités avec le soutien du conseil régional de Bretagne et l’office de la langue bretonne.
Quels sont vos principaux partenaires (notamment en terme d’édition) ?
A.E. : Nous travaillons en coédition avec Bayard, Dargaud, Glénat qui nous informent des réimpressions prévues en telle ou telle langue. Pour limiter le coût, nous nous greffons dessus.
Quel est votre rôle au sein de l’association ?
A.E. : Je suis président de l’association.
Tudual Audic : Je suis traducteur. Je vends aussi quelques albums quand j’en ai l’occasion (forums, stages…)
Comment sont diffusés les livres et albums édités par l’association ? Quel est le public visé ?
A.E. : Ils sont diffusés sur Internet — www.b-heol.com — et en Bretagne par la société Coop Breizh.
Le public visé est surtout la jeunesse, mais également les adultes qui apprennent le breton, environ 8000 cette année en cours du soir.
Comment se font les traductions ?
A.E. : Les traducteurs sont tous bénévoles passionnés de langue bretonne et/ou de bandes dessinées. Ils essaient de rester au plus proche du texte d’origine en tenant compte également de l’emplacement réservé dans les bulles.
Quelles relations avez-vous avec les éditeurs ?
A.E. : Elles sont bonnes ! Les éditeurs, à mon grand étonnement, ont tout de suite été favorable à des versions en breton de leurs héros.
L’association participe-t-elle à certains événements BD ?
A.E. : Oui, au festival du livre qui a lieu à Carhaix le dernier week-end d’octobre. C’est le plus grand salon de Bretagne.
Et Thorgal… Pourquoi ce choix ?
A.E. : Parce que l’un des collaborateurs, Tudual Audic, qui avait déjà traduit Boule & Bill, est particulièrement fan de cette série.
T.A. : Mon père était abonné au Journal Tintin entre les années 50 et 65 et il m’a transmis le virus de la bande dessinée. Thorgal faisait partie de mes chouchous dans les années 1985-1990. En plus, c’est une BD qui marche bien au box-office avec des scénarios qui tiennent la route, un graphisme excellent et un subtil mélange de magie et d’humanité.
Avez-vous contacté ou été contacté par les auteurs ?
A.E. : Non, nous avons juste des contacts avec Le Lombard.
T.A. : Pas pour l’instant.
Il y a 28 albums, pourquoi avoir choisi « Les 3 vieillards du pays d’Aran » et « Arachnéa » ?
T.A. : On fait des petits tirages et on se greffe sur les rééditions dans d’autres langues à plus fort tirage pour diminuer les coûts de production. Ces deux albums viennent d’être réédités en 2005 en néerlandais ou français, je crois.
Y a-t-il des difficultés particulières pour traduire et éditer une série comme Thorgal ?
A.E. : Au niveau de l’édition, je ne vois pas de difficulté particulière.
T.A. : Pour la traduction, pas particulièrement si ce n’est que le fantastico-mythologique nordique a été fort peu traduit en breton et qu’il y a donc un peu de réflexion à fournir avant de se lancer. A part ça, comme pour toute autre BD, il faut que ça tienne dans la bulle, donc dans certaines occasions, vu les spécificités de chaque langue, il faut rallonger la sauce ou alors au contraire couper pour rentrer dans les phylactères.
Quel est le tirage de Thorgal en breton ?
A.E. : 1000 exemplaires.
Est-ce que d’autres albums de Thorgal sont prévus ?
A.E. : Oui, si les deux premiers albums se vendent bien.
D’autres séries ?
A.E. : Oui, il y a d’autres projets en cours mais c’est un peu trop tôt pour en parler.
(Entretiens réalisés en octobre 2005)
Albums parus
An 3 den kozh a Vro-Aran
Septembre 2005
Araknea
Octobre 2005
Alinoe
Octobre 2006
Bugel ar stered
Novembre 2006