Benjamin
Ce sujet a 7 réponses, 4 participants et a été mis à jour par kunpeng, il y a 5 ans et 2 mois.
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Sujet
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Il y a 10 ans j’ai gagné je ne sais quel concours sur le net qui m’a permis de recevoir 3 BD des éditions XIAO PAN, ces Bd présentaient de jeunes auteurs chinois œuvrant dans le contexte d’une Chine en plein essor économique à la veille des JO de Pékin.
Ainsi, j’ai découvert One Day et Remember de Benjamin.
Remember contient le troublant « Personne n’est capable de voler, personne n’est capable de se souvenir » mon préféré.
C’est du Manhua, une bande dessinée chinoise. Benjamin ne dessine qu’avec une tablette graphique (de l’époque, évidemment j’ose imaginer que son style a évoluer avec les techniques aussi), dans un style hyper réaliste, tout en étant influencé de manga japonais, seule influence artistique valable à l’époque en Chine. Présenté comme ça, moi ça ne me ferait pas envie non plus en fait.
Mais en fait, la technique on s’en fout vu qu’il la maitrise ! ce qui est magnifique c’est la vie qu’il insuffle à ses personnages, la sensibilité qui l’habite, la couleur qu’il met au service des émotions, les lumières tout à la fois réalistes et psychédéliques.
Il dessine des visages en contre-plongée qui sont très beaux, regardez-vous en contre-plongée dans un miroir … vous verrez c’est pas joli joli.
Les personnages parfois flottent, ont l’air de planer…. c’est très poétique, et profondément déprimant aussi. Son dessin est tout de même empreint de la souffrance d’une jeunesse non salariée donc sans avenir dans cette Chine capitaliste.
La cohabitation d’un réalisme hyper-sensible et de l’expressionnisme manga est parfois étrange, bizarre, mais ça fonctionne, il suffit de tourner la page et paf ! on prend une claque parce que c’est magnifique.
Il s’agit vraiment de couleur directe, à aucun moment Benjamin nous fait regretter l’usage du dessin tant son utilisation de la couleur et de la matière sert l’émotion qu’il exprime.
Ainsi j’ai découvert un auteur de ma génération, un auteur chinois dont la sensibilité et l’expression graphique et écrite m’ont touchée très profondément. J’ai relu ces BD récemment et plus je vieillis plus la lecture de ces histoires graphiques ont la saveur d’une jeunesse toute particulière, ces années difficiles durant laquelle on peut être trop jeune. trop sensible, trop violent, trop, trop, trop tout, surtout quand on est un créatif. J’ai en mémoire cette jeunesse très à vif, dédiée à la quête perpétuelle de sa propre sensibilité pour créer, exprimer, inventer, imaginer… Bref, Benjamin est (était) un jeune créatif, un sensible, un écorché et ces histoires sont simples et complexes, vivantes, universelles, humaines … des histoires de jeunesse.
Je vous mets quelques commentaires trouvés sur le net, que je trouve très justes :
« Dans cette histoire, les sentiments, les émotions qu’on nous fait passer sont vraiment grandes, voire même indescriptibles. » (Personne n’est capable de voler, personne n’est capable de se souvenir)
» Benjamin est un auteur qui a son propre style, ayant évolué au fil de ses récits. Après One day et Remember, Orange vient à son tour nous envouter par la beauté du graphisme et nous arracher des larmes. C’est en pensant à notre adolescence personnelle qu’on lit cette histoire bouleversante de réalité, nous remémorant cette souffrance que certains d’entre nous ont éprouvée durant cette période pas toujours facile. Les dessins quant a eux sont réussis, les personnages ont toujours une émotion peinte facilement reconnaissable. Un véritable chef d’œuvre, à tous les niveaux. »
Si j’ai le courage, c.a.d pas trop la flemme, j’ajouterai des images de quelques pages que j’aime tout particulièrement.
Depuis 2014 on en entend plus trop parler en France, il n’y a plus d’éditeur pour les auteurs chinois chez nous.
Mais que devient Benjamin ?
Voilà un auteur qui manque au paysage européen de la bande dessinée.
- Ce sujet a été modifié le il y a 5 ans et 11 mois par Hirondl.